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« Sans fumée ni tabac » : gare aux nouveaux produits de la nicotine 

Cet article a pour objectif de vous présenter deux nouveaux produits des cigarettiers, les « puffs » et les « pouches », qui sont sans fumée …et même sans tabac ! Et oui, la cigarette classique a de moins en moins le vent en poupe et la législation belge continue de se renforcer pour débanaliser l’usage du tabac. Alors l’industrie du tabac cherche à tout prix des technologies innovantes pour poursuivre et même accroître son commerce de nicotine sous de nouvelles formes, notamment auprès des consommateurs potentiels que sont à ses yeux les jeunes générations et les ex-fumeur.euse·s. 

Passons à présent sous la loupe ces nouveaux produits de la nicotine. Les « puffs » et « pouches », bien qu’ils soient moins risqués pour la santé physique car sans fumée de tabac, méritent toute notre attention car ils restent très addictifs et sont conçus pour créer le besoin de continuer à consommer. Vous trouverez ci-dessous une petite présentation des puffs et des pouches, conçue pour permettre de poser un regard critique et éclairé sur ces étonnantes nouveautés du marché de la nicotine. 

«  Fumer n’est pas dans la nature de l’homme

s’il n’a pas été manipulé pour que cela devienne sa nature « 

– Professeur B. Dautzenberg

La « puff », une cigarette électronique jetable prête à l’emploi

C’est quoi la puff ?

Une puff, parfois aussi appelée « puff-bar » ou « pod », est une nouvelle/la 5ième génération de cigarette électronique. Le dispositif est à usage unique, préchargé au niveau du réservoir (de 300 à 800 bouffées de e-liquide avec ou sans nicotine) et de l’accumulateur (batterie). La puff a été créé en 2019 et propulsée sur le marché européen à la fin de l’année 2021. Elle est disponible dans de nombreux commerces et librairies et aussi via des sites de vente sur internet.

Que dit la loi au sujet des puffs ?

Classée comme produit du tabac, la puff est officiellement interdite à la vente aux mineurs de moins de 18 ans en Belgique. Comme les autres produits du tabac, l’usage de la puff n’est pas autorisé dans les lieux publics fermés ni en voiture en présence de mineurs d’âge.  

Qu’est-ce qui cloche dans la puff ?

Alors que la cigarette électronique a été créée pour diminuer les risques pour la santé et pour faciliter l’arrêt du tabagisme classique, la puff questionne pour les raisons suivantes :

  • La puff vise les publics de jeunes: tout dans la puff est fait pour séduire le public adolescent, que ce soit le packaging et les arômes attractifs ou encore la facilité d’utilisation immédiate. Ensuite, pour se faire connaître, le produit a utilisé une stratégie de marketing publicitaire déguisé, la puff étant vantée par des influenceurs et des créateurs de tendances sur des réseaux sociaux comme TikTok qui sont principalement fréquentés par les jeunes.
  • Le risque de devenir dépendant à la nicotine est puissant: les puffs peuvent contenir des liquides plus ou moins dosés en nicotine.  La nicotine est un produit chimique qui a un effet psychoactif sur le cerveau et qui a un impact défavorable sur le fonctionnement cardio-vasculaire en cas d’usage répété. Si la nicotine classique agit vite, les sels de nicotine qui sont souvent utilisés dans les puffs ont une formule chimique qui délivre encore plus rapidement leur effet dans le cerveau et vont créer plus facilement une dépendance puissante en cas de consommation. Le cerveau adolescent, qui est encore en pleine construction, est particulièrement sensible aux neurostimulants comme la nicotine. En cas d’usage de puff avec nicotine durant l’adolescence, il existe un risque d’appel plus fort de la substance et la tentation de passer à la cigarette classique pour avoir sa dose plus facilement.
  • L’impact écologique des dispositifs électroniques jetable est élevé: puisque la puff est un produit jetable à usage unique, les matières plastiques et les batteries qui la composent vont finir au mieux dans une poubelle et au pire dans la nature. Il s’agit donc d’une nouvelle source impressionnante de déchets polluants, sur une planète déjà en alerte écologique orange et aux ressources naturelles limitées.  

La pouche ou nicopouche, un sachet de nicotine orale

C’est quoi un nicopouche ?

Un pouche, parfois aussi appelé « nicopouche » ou « nicotine pouche » ou « nicopod », est un sachet contenant de la poudre de nicotine pure créée en laboratoire, sans aucun recours à l’usage de feuilles de tabac. Il s’agit d’un produit à usage buccal, à poser entre la gencive et la joue pour laisser la nicotine se diffuser dans le corps par la voie des petits vaisseaux sanguins de la bouche.

 

Le pouche est apparu sur le marché commercial durant l’année 2018 et a été présenté au public comme un « shot sans tabac ».

Bien que le nicopouche ressemble très fort à un produit du tabac qui s’appelle « snus » et dont l’usage est assez répandu en Europe du Nord (Norvège, Suède, Finlande), la différence est que le pouche est rempli de nicotine synthétique créée sans tabac alors que le snus est un sachet oral rempli de poudre de tabac.

Que dit la loi au sujet des pouches ?

Les pouches étaient au départ non soumis à la législation du tabac puisqu’ils n’en contiennent pas. Cependant, depuis 2021, les nicopouches sont considérés par la loi fédérale belge comme des produits similaires aux produits à base de tabac, vu leur haut degré de ressemblance à la fois sur la forme et aussi sur les effets avec ceux d’un sachet de tabac buccal appelé « snus ». Dès lors, il est interdit à présent de vendre des nicopouches aux mineurs et aussi d’en faire la publicité.

Qu’est-ce qui cloche avec les nicopouches ?

  • La confusion volontaire avec les substituts thérapeutiques à l’usage du tabac: l’industrie joue la carte de présenter les nicopouches comme un produit de libération du tabac, qui permet de délivrer de la nicotine en choisissant son dosage, avec un mode d’action comportant moins de risques pour sa santé personnelle et pour celle de son entourage vu qu’il n’y a aucun tabagisme passif. Il y a beaucoup de ressemblance à première vue avec les substituts nicotiniques pharmaceutiques prescrits par les professionnels de la santé dans les accompagnements de fumeur·euse·s . Par contre, il est à noter que la vente des nicopouches est libre et se fait sans avis médical préalable, ni information claire sur les risques d’un usage répété de nicotine par voie orale.
  • Une concentration plus forte en nicotine par sachet que dans une cigarette: comportant des dosages de nicotine allant jusqu’à 50 mg par sachet, les nicopouches peuvent être de vraies « bombes à nicotine ». En termes d’équivalence, chaque sachet peut valoir jusqu’à 3 cigarettes en concentration de nicotine. Comme les boîtes de nicopouches contiennent en général 20 sachets, les personnes qui en consomment une boîte par jour peuvent alors sans même s’en rendre compte absorber autant de nicotine qu’en fumant 60 cigarettes ! Plus la dose de nicotine est élevée, plus le risque d’effets toxiques sera important. Et si les nicopouches à l’emballage coloré et aux saveurs attractives  arrivent sans surveillance entre les mains des enfants ou sous le museau des animaux de compagnie, on peut craindre un risque de surdose toxique.
  • L’encouragement implicite à la multiplication des consommations de nicotine: les messages publicitaires insidieux trouvés sur des sites de producteurs présentent les nicopouches comme un atout pour choisir son mode de délivrance de la nicotine durant la journée, en alternant sa consommation selon les envies et les règles en vigueur : des produits du tabac fumé + des produits du tabac électronique + des produits du tabac par voie orale. Au final, la consommation de nicotine est démultipliée plutôt que d’être réduite.

Le mot de conclusion

Sans chercher à diaboliser les nouveaux produits de la nicotine, cette présentation

tend à démontrer que ces nouveaux produits ont en tout cas un effet à contre-courant des enjeux de santé publique. En effet, puffs et pouches cherchent à rendre normal et accessible l’usage régulier de la nicotine, alors que cette substance n’est pourtant pas indispensable à l’être humain et qu’elle est connue pour créer facilement une dépendance et le besoin de consommer.

 

Article rédigé par Marie Housiaux, Fares asbl 

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